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The culture beyond borders

A découvrir : Performance photographique autour de l’attente en ces temps confinés

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Nous allons vous présenter ici l’initiative d’une artiste italienne que nous avions rencontrée à Marseille lors de son séjour en notre ville et dont nous avions apprécié le travail photographique et l’originalité de la démarche. Sama Sbrissa nous offre aujourd’hui le fruit du travail participatif de son dernier projet.

Naissance d’un projet

Sama Sbrissa, jeune femme talentueuse au tempérament non conformiste, fourmille d’idées et de projets. Née à Castelfranco en Vénétie (Italie), elle est aujourd’hui photographe professionnelle, diplômée de l’Institut supérieur de photographie et des arts visuels de Padoue. Au fil des ans, elle a développé sa pratique artistique en se mettant en scène dans ses photographies où elle mêle image et performance afin de transmettre de façon suggestive et inattendue ses expériences et interrogations personnelles.

A l’aide d’un détecteur lent, actionné manuellement, elle photographie son corps. Enduites ou non d’argile, les parties de son corps ainsi mises en scène sont prises en gros plan, également en macro offrant ainsi un rendu en noir et blanc étonnant, questionnant avec pertinence et justesse notre rapport au corps-matière vivante et à l’intime. Autre sujet de son inspiration, les insectes dont elle révèle toute la beauté dans ses images fixes. La question de la « métamorphose permanente » est ici au centre de sa recherche artistique.

Curieuse, éclectique dans ses goûts, son inspiration prend forme également à travers l’art sculptural, qu’elle a appris à l’Institut d’Art Pietro Selvatico de Padoue et à l’Institut du Marbre Pietro Tacca di Carrara.

 

collage 1- copyright Sama Sbrissa

Il est évident que la période de confinement et d’isolement, avec l’attente (et questions) qu’elle génère chez chacun de nous qui le vivons actuellement, et son expérience de la grossesse, les métamorphoses successives induites par cet état qui transforme le corps de la femme enceinte coextensives à la longue attente de l’enfant à naître, l’ont conduite à imaginer un projet original autour de ces deux thèmes qui ont pour point commun la notion d’attente.  

« 9 comme les 9 mois d’attente pendant une grossesse »

Afin d’essayer d’aller au-delà des peurs, anxiétés et frustrations de chacun de nous qui sommes dans l’attente d’un éventuel retour à la normale mais également de ceux qui sont là pour lutter au quotidien contre le covid19 (médecins, infirmières, personnels de santé etc.), la jeune femme a mis en parallèle la question de l’attente de chacun de nous qui vivons isolés les uns des autres avec celle de l’expérience de la grossesse : elle a pensé cette « poétique de l’attente » comme celle « d’une communauté enfermée dans de nombreuses petites enveloppes ».

Le parallèle avec le fœtus qui doit attendre patiemment son temps pour naître, pour être ensuite exposé à des joies (et dangers) inconnu(e)s, lui est apparu spontanément. En effet, « pour l’enfant, chaque petit événement simple est vécu comme une découverte : en sera-t-il ainsi pour nous aussi? Nous habituerons-nous à cette nouvelle normalité? » S’interroge-t-elle.

Son intention est néanmoins de délivrer un message positif à toutes les mamans dans l’attente mais pas seulement, en valorisant le (bien que difficile) temps d’attente avant la naissance (de l’enfant), renaissance (de la femme-mère). A savoir, « comment prendre soin, savoir doser le temps et générer une nouvelle vie » précise-t-elle.

Enceinte de 9 neuf mois, la jeune maman qui réside actuellement à Padoue, en Vénétie (province d’Italie) où 1502 habitants sur les 18224 cas confirmés ont succombé au Covid19, a proposé ainsi à des femmes enceintes de collaborer à son projet en se photographiant le ventre pris de front, photographie qu’elle a retravaillé en y ajoutant des aiguilles d’horloge.

collage 2- copyright Sama Sbrissa

Le collage présenté ci-dessus est une image représentative du projet avec ses « 9 bancs en attente » et ses aiguilles positionnées sur différents horaires. Les aiguilles du temps ainsi posées sur le nombril, au centre du ventre-horloge, nous pousse à repenser notre rapport au temps, par extension au monde, notamment celui de l’après-confinement, voire à sa renaissance. A savoir, quelle renaissance possible ?

Ce travail artistique nous questionne alors sur le regard (lequel ?) que nous aurons à porter dans cette nouvelle phase à ce nouveau temps à venir, le souci, l’attention et le soin, que nous devons lui consacrer. Un bien beau projet que nous souhaitions vous présenter en ces temps douloureux. Diane Vandermolina

 

Image de Une: Sama Sbrissa

Rmt News Int • 4 mai 2020


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