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Infiniment, Maria Casarès, Gérard Philipe, une évocation à la Maison Jean Vilar

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Maison de la mémoire et de l’histoire du Festival, la Maison Jean Vilar célèbre les 100 ans de la naissance de ces deux artistes essentiels à l’aventure de Jean Vilar et à celle de la France des années cinquante, Maria Casarès et Gérard Philippe. Au travers de l’exposition Infiniment, Maria Casarès, Gérard Philipe, une évocation, visible dès le 7 juillet, elle propose au visiteur de plonger dans l’univers fascinant de ces deux figures inoubliables du théâtre et du cinéma de l’après-guerre.

Exposition hommage à deux icônes du théâtre et du cinéma

Maria Casarès, la brune galicienne aux yeux verts, exilée en France, a souvent incarné celles qui aiment sans retour, les femmes mélancoliques, les reines meurtrières, les princesses des ombres. Gérard Philippe, l’insouciant jeune homme au visage angélique, a interprété au fil de sa carrière les princes écorchés, les amants cyniques, les hommes vulnérables, mais aussi les héros bondissants et les amoureux romantiques. Ils auraient eu le même âge cette année : 100 ans.

Elle et lui sont nés à une dizaine de jours d’écarts en 1922, au bord de la mer, lui le 4 décembre à Cannes, elle le 21 novembre à la Coronne en Galice : ils se sont rencontrés très jeunes, ils se sont fréquentés, perdus et retrouvés. Au fil des rendez-vous artistiques, ils ont tissé une fraternité, une amitié amoureuse.

Gérard Philipe et Maria Casarès dans Le Cid, 1958 Photographie Agnès Varda © succession varda

 « Tous deux viennent de familles aisées. Gérard d’une famille bourgeoise qui tient un hôtel de luxe à Grasse, Maria, d’une famille d’intellectuels engagés : on père fut président du conseil lors de la brève 2eme république, juste avant la guerre civile, L’exil vers la France bouleverse la jeune Maria, qui se considèrera toute sa vie comme une femme des exils. Elle accordera toujours une grande place aux auteurs espagnols qu’elle interprètera tout au long de sa carrière : Lorca et tout particulièrement Valle Inclan, autre galicien… » précise Jean-Pierre Moulères, commissaire de l’exposition avant de continuer. « Ils sont étonnamment beaux, deux beautés singulières et presque opposées encore : Maria la noire, la sombre, la ténébreuse, la femme qui aime sans être aimée – déjà dans son premier rôle auprès de Jean-Louis Barrault dans Les Enfants du paradis. Gérard Philipe, le lumineux, l’espiègle, le prince blanc, interprète déjà un ange dans une de ses premières pièces, Sodome et Gomorrhe de Jean Giraudoux. »

Ce sont les enfants terribles des planches de l’après-guerre, enfants des écrans de la libération, ils sont les idoles d’une jeunesse qui a connu toutes les privations, une jeunesse avide de modernité, éprise de liberté. Figurant tout à la fois la jeunesse, la beauté et une certaine forme de grâce, ils ont su incarner leur époque par leur engagement comme leur inscription dans l’histoire et les mythologies françaises et européennes.

En effet, poursuit le commissaire de l’exposition, «ils incarnent pleinement la jeunesse de l’après-guerre. Comme pour beaucoup, ils sont animés d’un appétit féroce qui les pousse à expérimenter, à brûler la vie et les planches. Ainsi en 1947 en marge du tournage de La Chartreuse de Parme, sur lequel ils vivent une idylle romaine, Gérard travaille avec son ami Henri Pichette, grand admirateur d’Artaud, à l’écriture d’un « mystère profane » : Les Epiphanies, un long poème animé d’une puissance à la fois sauvage et lyrique. Gérard entraîne Maria dans ce projet qui rencontrera un grand succès dans les milieux de l’avant-garde artistique. Des photos célèbres, pour certaines signées Doisneau, immortalisent la grâce de ce moment. »

Maria Casarès et Gérard Philipe, Les Épiphanies, 1947 © Photographie George Henri – BnF, Arts du spectacle

Ils ont foulé les planches de la grande aventure populaire du TNP avec Jean Vilar et sont devenus les icônes de cette aventure marquant de leur empreinte des générations de spectateurs et d’avignonnais mais également l’histoire du théâtre. Du Prince de Hambourg au Cid, de Macbeth à Phèdre, Gérard Philipe et Maria Casarès ont su mettre au service du Théâtre populaire leur notoriété et leur exceptionnel talent.

« Tous deux interprètent les grands rôles au TNP et sont de fait rarement dans les mêmes distributions. Dans les années 50, Maria Casarès, contrairement à Gérard Philipe, ne se consacre plus qu’au théâtre, saut pour interpréter la Princesse, figure de la mort dans Le testament d’Orphée de Jean Cocteau. Gérard Philipe continue, quant à lui, d’alterner théâtre et cinéma. Son rôle emblématique de Fanfan la tulipe lui octroie une renommée mondiale, cependant, il ne se contente pas de jouer les héros bondissants et interprète également des rôles plus troubles, plus complexes comme Monsieur Ripois ou intensément mélancoliques comme Modigliani dans Montparnasse 19 » développe-t-il.

Hélas, la disparition précoce de Gérard Philipe et la mort soudaine d’Albert Camus qui brisa Maria Casarès scellent tragiquement leur destin. L’exposition retrace alors leur carrière commune de 1922 à 1959. Elle propose une immersion fragmentée dans l’univers de deux géants qui incarnent à eux seuls une histoire du théâtre et du cinéma, invitant les visiteurs à un parcours au travers de plus d’une centaine de photographies – souvent rares ou inédites, de documents d’archives (objets, correspondances, magazines de l’époque, albums d’admirateurs…), d’extraits de films et de bandes sonores, de costumes du TNP…pour découvrir – pour les plus jeunes – ou simplement se souvenir de ces deux immenses artistes.

Gérard Philipe, Richard II, 1954
Photographie Agnès Varda © succession varda

« De nombreuses photos, issues du fonds Jean Vilar sont exposées, mais aussi de nombreux inédits d’un don récent des enfants Philipe. Nous avons également sélectionné des photos de presse, provenant de magazines tels que Ciné Revue ou Paris Match, qui ont amplement illustré leur carrière et une partie de leur vie privée. Toute la période TNP, quant à elle, est exclusivement commentée par des photos d’Agnès Varda» commente le commissaire de l’exposition.

Les scénographes de BT architectes – qui ont signé la scénographie de l’exposition Côté Jardin – ont imaginé un dispositif immersif en 8 sections au rez-de-chaussée de la Maison Jean Vilar. Là se déploie, dans un récit poétique et documenté, un parcours biographique qui retrace, de leur enfance à la disparition de Gérard Philipe en 1959, ces destins singuliers et pourtant parallèles. Au plus près de l’intime, quand la vie et l’art se confondent, on retrouve Gérard Philipe et Maria Casarès au côté des plus grands artistes de leur époque, Vilar bien sûr, Camus, évidemment, mais aussi Pichette, Cocteau, Artaud, René Clair et tant d’autres… Dans leur engagement politique, syndical et artistique, et dans leur voix, leurs gestuelles et leurs danses incarnant des rôles devenues autant de doubles d’eux même : Le Cid, Lorenzaccio, Ruy Blas, Macbeth, Phèdre, Marie Tudor…et Le Petit Prince!

Maria Casarès, Marie Tudor, 1954 Photographie Agnès Varda © succession varda

La scénographie se découpe en plusieurs sections thématiques : l’enfance ; les apprentissages, du Conservatoire aux premières expériences de théâtre et de cinéma. « Une section entière est consacrée aux Épiphanies, qui représente un moment d’intense créativité partagée. Une autre est entièrement dédiée au TNP. Deux costumes y sont exposés – non pas sur des mannequins, mais allongés dans des vitrines, comme des reliques d’un art fait de fulgurances et de sueur. On retrouve aussi une galerie de portraits de studio réalisés par de grands photographes tels que Thérèse Le Prat, Raymond Voinquel, Laure Albin Guillot ou Harcourt. Une section est réservée aux admirateurs, y sont exposés des cahiers originaux contenant des coupures de presse scrupuleusement archivées par des fans, comptant parfois 5 ou 6 tomes » s’émerveille-t-il.

Une exposition à découvrir. A vos agendas ! DVDM

Photo de Une: Maria Casarès et Gérard Philipe, Les Épiphanies, 1947. Photo Boris Lipnitzki © Studio Lipnitzki – Roger Viollet

A noter : les trois rendez-vous exceptionnels autour de l’exposition.

Deux lectures au Jardin de Mons à la Maison Jean Vilar

– 11 juillet à 11h, Les enfants terribles, proposée par la Maison Maria Casarès

– le 21 Juillet à 11h, Correspondances, avec Anne-Marie Philipe et Stanislas Nordey

Une projection-rencontre au Cinéma Utopia le 20 juillet à 18h  du film documentaire Le Dernier hiver du Cid, d’après l’ouvrage de Jérôme Garcin, suivi d’une rencontre avec Anne-Marie Philipe, Jérôme Garcin et Patrick Jeudy, le réalisateur.

Bon à savoir :

L’Association Jean Vilar/Maison Jean Vilar propose dans le même temps trois expositions :

L’oeil présent, photographier le Festival d’Avignon au risque de l’instant suspendu

Une exposition de Christophe Raynaud de Lage. Du 7 juillet 2022 au 31 mars 2023 – de 11h à 20h. Une plongée sensorielle dans la mémoire récente du Festival d’Avignon, l’exposition-déambulation fait renaître dix-sept ans d’émotions collectives par le photographe Christophe Raynaud de Lage.

Ce soir, oui tous les soirs, Jean Vilar, Notes de service, TNP 1951 – 1963

Du 5 juillet au 31 mars 2023 de 11h à 20h. C’est par des notes punaisées sur un tableau de service que Jean Vilar partageait avec toute la troupe du TNP ses conseils, ses doutes et ses ordres. L’exposition itinérante expose des notes de service issues des archives de la Maison Jean Vilar et la diffusion de l’enregistrement d’une sélection de 60 notes de services accompagne les visiteurs. Elle a été réalisée par 10 jeunes comédiennes et comédiens des Jeunes Talents de l’ADAMI, sous la direction artistique de Robin Renucci, actuel directeur du Théâtre National de la Criée.

Côté Jardin, Jean Vilar et Avignon, promenade photographique au Jardin des Doms

Du 4 juin 2021 au 13 novembre 2022 de 7h30 à 22h en entrée libre. Cette exposition inaugurée en juin 2021, vue par plus de 500 000 visiteurs du jardin, est prolongée jusqu’en novembre 2022. Le temps d’une promenade en noir et blanc dans les coulisses des premiers festivals d’Avignon, l’exposition vous invite à une visite inédite du jardin des Doms en découvrant une trentaine de  photographies en grand format signées Agnès Varda mais aussi Maurice Costa, Suzanne Fournier, Boris Lipnitzki ou Serge Lido.

Plus d’infos

Billetterie commune aux trois expositions

Tarif plein : 6€ / Tarif réduit 3 € sur présentation d’un justificatif : – de 26 ans, sénior (+ de 65 ans), intermittents du spectacle, demandeurs d’emploi, groupes à partir de 10 personnes, bénéficiaires du RSA, personnes en situation de handicap.

Horaires : Pendant le Festival d’Avignon : du 7 juillet au 26 juillet 2022/Tous les jours de 11h à 20h et du 1er aout 2022 au 30 avril 2023/du mardi au samedi de 14h à 18h

Réservation : Maison Jean Vilar : 04 90 86 59 64 – accueil@maisonjeanvilar.org

Rmt News Int • 1 juillet 2022


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