Le ZEF : une nouvelle saison et une réouverture en fanfare !
Francesca Poloniato nous dévoile la nouvelle saison du ZEF
A l’occasion de la réouverture de la Gare Franche, 7 chemin des Tuileries à Marseille, le 23 septembre dès 16h30, nous nous sommes entretenus avec Francesca Poloniato, directrice du ZEF- Scène Nationale de Marseille sur la saison à venir et les orientations du ZEF.
Diane Vandermolina : Quelle est la ligne directrice de la programmation et les temps forts?
Francesca Poloniato : « Les spectacles de la saison invitent à réinterroger notre société et à rêver différemment. On a des spectacles avec des enjeux écologiques aussi. On a des spectacles jeunes publics (les Oiseaux, Jamais dormir) et tout public où les enfants peuvent venir avec leurs parents. Par exemple, Les lasagnes de la Nonna de Massimo Furlan a réuni des femmes italiennes immigrées en Suisse dans les années 60 pour réaliser des lasagnes. Étant moi-même italienne, avec une mère et une grand-mère qui savent ce que représentent les lasagnes en Italie, j’ai été immédiatement attirée. Au-delà de la recette, c’est une véritable exploration de l’identité, de l’intégration dans un pays étranger, et des liens familiaux. Ces femmes, ouvrières, mères au foyer… chacune a son histoire, et le temps qu’elles prennent pour préparer ces lasagnes reflète la richesse de leurs vies. Le projet inclut aussi David, un danseur professionnel, dont la grand-mère, qui a accepté son homosexualité, a une place importante dans sa vie. C’est un projet très universel, qui parle de l’acceptation de la différence, et de l’amour, le tout avec beaucoup d’humour. Sabat Mater est une coproduction avec le KLAP : Kélémenis m’a proposé cette collaboration, et l’idée de présenter du flamenco, une forme d’art que j’apprécie, au public d’une scène nationale m’a tout de suite séduite. Anna Pérez travaille avec José Sanchez au théorbe ; c’est une pièce poignante qui explore la perte et la résilience d’une mère. Carmen est le dernier volet d’une trilogie de François Grimaud, après Phèdre et Gisèle. Chaque pièce explore la figure féminine à travers les époques, avec une comédienne pour Phèdre, une interprète pour Gisèle, et une musicienne exceptionnelle, Rosemary Stanley, pour Carmen. C’est un vrai oiseau rebelle et on la co-programme avec La Criée.
DVDM : Parlez nous des propositions artistiques des artistes associés ?
F.P. :« L’ensemble C barré est un club orchestre, un orchestre de quartier qui réunit une centaine d’enfants, d’adolescents et on l’a élargi aux parents ou grands-parents. Chaque participant du club orchestre se voit prêter son instrument de prédilection. Chaque semaine à l’école élémentaire de la Busserine, ils et elles se réunissent autour de la pratique de la mandoline, du violoncelle et des percussions et viennent également répéter au Zef, on va d’ailleurs voir à ouvrir au 3ème un espace pour accueillir l’ensemble et donner des cours de musique aux enfants. Ce club orchestre a travaillé avec des compositeurs Amine Soufari et Mehdi Telawi, projet créé par Sébastien Bois, le chef d’orchestre, sur la thématique de l’exil. A la gare Franche, on a un projet avec Floriane Facchini qui est une metteuse en scène franco-italienne, un laboratoire culinaire écologique et populaire. Pour elle l’alimentation devient un outil pour se rencontrer, interroger notre relation aux autres et au monde en général qui nous entoure : l’alimentation fait partie pour elle des luttes sociales. Elle a créé un spectacle à partir d’une histoire qui s’est passée en 1943, où Mussolini avait interdit aux paysans de semer du blé pour empêcher qu’il y ait du pain et des pâtes, pour ne pas nourrir les résistants. Il y a une famille de sept frères, qui s’appelle la famille CERVI, qui ont enfreint cette règle, qui ont semé du blé, qui ont vraiment beaucoup aidé les résistants, qui leur ont permis en tout cas de pouvoir résister à fascisme, on va programmer la saison prochaine la prestation antifascista de Casa de Cervi avec des habitantes et des professionnels sur ce plateau. 2 projets engagés. »
DVDM : Depuis 10 ans, vous pratiquez une politique tarifaire basse ?
F.P. : « C’est une volonté que j’ai affichée à ma candidature, à mon oral. Je trouve que c’est très important d’avoir une politique tarifaire basse. Aujourd’hui, vu le coût de la vie, aller à quatre voir un spectacle, ça coûte cher et je me dis, au tarif familial de 5 euros, 20 euros à quatre, on peut sortir. Et c’est super parce que on peut les revoir quatre fois dans la saison. Ma plus grande fierté est qu’on a la moitié du public qui vient du quartier, l’autre du centre-ville. Ce sont des jeunes et des femmes qui me disent combien ils sont heureux de venir. C’est un bonheur de voir que tout le monde peut aller voir un spectacle et se côtoyer.»
Réouverture de la Gare Franche
Cette nouvelle saison, placée sous le signe de la réinvention et de l’engagement social, est célébrée lors de la réouverture de la Gare Franche, ce 23 septembre. L’événement, gratuit et ouvert à tous, permet au public de découvrir un espace métamorphosé et de prendre un avant-goût des spectacles à venir.
La Gare Franche, après deux ans et demi de travaux, rouvre ses portes, et l’événement est une véritable fête. Les visiteurs découvrent une Gare Franche métamorphosée. L’Usine, rénovée et modernisée, offre un plateau et des gradins repensés pour une meilleure expérience du public. La Bastide réhabilitée conserve son charme authentique tout en gagnant en fonctionnalité. Et les jardins, agrandis et repensés, sont un véritable havre de paix au cœur du complexe.
Comme le souligne Francesca Poloniato, directrice du ZEF, « ce n’est pas simplement une réouverture, mais une célébration d’un projet artistique et culturel ancré dans le territoire ». La journée d’inauguration, gratuite et ouverte à tous, reflète parfaitement cette ambition. Dès 16h30, la Parcelle aux 4 vents, nouvel espace vert, accueille un goûter convivial fait maison. L’ambiance est familiale, décontractée, prélude à une soirée riche en émotions.
Au menu
En ouverture (17h30), les Ateliers Sud Side et Arthur Pérole investissent le Plan d’Aou avec “Jour de Fête”, une chorégraphie participative qui transforme l’espace urbain en un joyeux carrousel avec son manège fabriqué pour les J.O. « J’avais envie que ce soit joyeux. Les enfants pourront monter dans le manège », explique Francesca Poloniato, en évoquant la collaboration avec les Ateliers Sud Side, « leur travail avec les jeunes du quartier est remarquable ».
A 18h, côté Bastide, Floriane Facchini, avec sa performance “Pastasciutta Antifascista”, mêle la création culinaire à un DJ set engagé « On y entendra Bella Ciao ». Cette expérience sensorielle unique illustre la volonté du ZEF de nourrir autant le corps que l’esprit. « En Italie, la cuisine est indissociable de la culture », précise Francesca Poloniato, soulignant l’importance de cette dimension dans le projet du ZEF. « Zara, notre maîtresse de maison, œuvre toute l’année à nourrir les ventres et sera là ce jour ».
A 19h, à l’Usine, la soirée se termine en apothéose avec l’Ensemble C Barré et le Club Orchestre de la Busserine, fruit d’un travail de longue haleine avec les habitants, puis Pierre Rigal et son spectacle “Rondes”, une expérience immersive et collective autour d’une danse folklorique célébrant les saisons, « avec ses costumes sublimes, fabuleux, créés par Pierre-Louis Mascia » (réservation obligatoire).
« Nous voulons proposer une programmation exigeante mais accessible, qui permette aux habitants de découvrir de nouvelles formes d’expression artistique tout en passant un bon moment », conclut Francesca Poloniato.
La réouverture de la Gare Franche est emblématique de l’engagement du ZEF à être un lieu de vie, de création et de partage, un lieu qui bat au rythme de Marseille, un lieu où la culture nourrit le corps et l’âme.
DVDM
Photo de une: Vincent Beaume




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