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MP13 : 354 jours de fêtes?

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La réalisation du programme de Marseille Provence 2013, avec ses 354 jours de manifestations festives et culturelles, n’a pourtant pas été le fruit d’une traversée sans histoire, bien au contraire. Son élaboration a suscité de nombreuses controverses aboutissant aux créations d’un Off, d’un Out et d’un Alter. Un historique de MP2013 s’impose ici afin d’en saisir les enjeux majeurs.

Petit rappel sur les dates et chiffres clés de 2013

Après le vote au conseil municipal de la candidature de Marseille au titre de Capitale Européenne de la Culture le 29 mars 2004, la campagne de candidature est enfin lancée en décembre 2006 avec, à la tête de l’association MP2013, nouvellement créée, Bernard Latarget, haut fonctionnaire respecté. Marseille a été désignée le 16 septembre 2008 Capitale Européenne de la Culture 2013, “un point de rencontre vertueux du culturel, du politique et de l’économique” pour reprendre les termes fétiches de Monsieur Pfister, le chantre du “jouer collectif”, également président de la CCIMP (Chambre du Commerce et de l’Industrie Marseille Provence), lors de son discours prononcé le 16 novembre pour le lancement de l’année capitale en présence d’Aurélie Filippetti. Entre deux conflits de territoires et de personnalités provoquant en 2010 le retrait de la communauté Toulonnaise ou l’annulation en 2012 d’opérations d’envergure (ex. Celle de la grande exposition sur Camus devant se tenir en septembre 2013 à Aix en Provence), au printemps 2011, MP2013 change de directeur : c’est Jean-François Chougnet qui a la charge de l’année capitale, secondé dans sa tâche par Bernard Latarget. Rappelons que ce dernier a été la cible privilégiée de toutes les critiques entre 2009 et 2011. Néanmoins, faisant fi de ces péripéties pour certaines rocambolesques, le président de MP2013 se réjouit d’avoir “mobilisé toutes les forces vives de notre territoire et transformé notre mosaïque en un tableau cohérent. À travers trois grands épisodes reprenant trois grands atouts de notre territoire : l’ouverture au monde, l’ouverture sur la nature, et la richesse de notre identité, Marseille-Provence 2013 propose une programmation dense et foisonnante.” Le programme se déroule ainsi en trois actes : «Marseille-Provence accueille le monde», «Marseille-Provence à ciel ouvert», «Marseille-Provence aux mille visages». Un programme dévoilé ce 16 novembre à la presse (ndrl: voir encadré pour plus de détail), programme longtemps tenu secret par l’association. Cette dernière n’a commencé à communiquer publiquement autour du contenu de l’événement inaugural que le 12 décembre 2012, soit un mois avant la mise à feu, avec distribution de flyers dans les boites aux lettres des particuliers et affichages au coeur des villes. Et ce, deux mois après la présentation de l’hymne officiel de 2013 Import/Export signé Gari Greu et du préprogramme du Week end inaugural, chichement distribué aux partenaires et à la presse. C’était le premier Week end de la Fiesta des Suds, le 20 octobre dernier.

MP2013 aujourd’hui

Du 12 janvier au 31 décembre 2013, soit une période de 354 jours et non 365 jours, Marseille-Provence propose un large panel d’événements dont 80 expositions dans de nombreux lieux nouveaux (une dizaine ont été créés spécialement pour l’événement) ou rénovés pour l’occasion (une quarantaine de chantiers de rénovations à ce jour). Parmi les grands chantiers culturels, citons le Grand Théâtre de Provence, 1300 places, et le Camp des milles, Aix en Provence; les Ateliers SNCF et la rénovation du Musée Arlaten, Arles; le Théâtre Liberté, Toulon ; le Pôle théâtral, La Seyne sur Mer; l’IMéRA, Institut Méditerranéen de Recherches Avancées, au Palais Longchamp; le Château de la Buzine, cinémathèque ; le Silo, salle de musique polyvalente, 2200 places; la Friche La Belle de Mai, avec la création d’un espace d’exposition; la Cité des arts de la rue; le Centre Régional de la Méditerranée; sans oublier le Musée Regards de Provence et le J1 à Marseille. Le J1 sera, hélas!, fermé une partie de l’année, absence de climatisation oblige. Aurélie Filippetti ayant visité le chantier du Mucem dont l’ouverture est prévue prochainement constate toutefois avec justesse que « La Capitale européenne de la culture a dynamisé le territoire et a permis à de nombreux projets de voir le jour. La région s’est dotée de nombreux équipements culturels signés de grands noms de l’architecture : la Villa Méditerranée de Stefano Boeri, le Fonds Régional d’Art Contemporain Provence- Alpes-Côte d’Azur et le Conservatoire d’Aix-en-Provence de Kengo Kuma. Le MuCEM de Rudy Ricciotti et son Centre de Conservation et de Ressources de Corinne Vezzoni, qui nous accueille, en est un des exemples les plus emblématiques. » Il est vrai que MP2013 a permis un investissement conséquent dans les équipements culturels et infrastructures du territoire qui n’auraient peut être pas vu le jour avant des décennies, question de politique culturelle mais aussi de budget. Venons en donc à cette épineuse question: qui a financé MP2013?

Question budget

Aujourd’hui, MP2013, c’est un budget global de 90 millions d’euro dont 29 millions (soit 32,20 % du budget) sont consacrés au fonctionnement (près de 20 % du budget global), à la communication-marketing et accueil du public et 61 millions (soit 67,80 % du budget) à l’artistique. En comparaison, le budget global de Lille 2004 était de 73,72 millions d’euros et l’artistique occupait près de 80 % dudit budget*. En 2008, le budget de MP2013 prévoyait cependant 97 millions d’euro dont 18 millions pour le fonctionnement, 6 millions pour la communication et 5 millions pour les actions de mobilisation soit 29,60 % du budget et 69 millions pour l’artistique soit 70,40 % du budget**. La baisse du montant global du budget s’explique par le retrait de la communauté d’agglomération Toulon Provence Méditerranée qui devait participer au financement à hauteur de 7,5 %. La répartition du financement du budget était la suivante et fut globalement respectée : Europe 2.5 % ; Etat 12.5 % ; Région Provence-Alpes-Côte d’Azur 12.5 % ; Département des Bouches-du-Rhône 12.5 % ; Marseille Provence Métropole et Ville de Marseille 22.5 % ; Communauté du Pays d’Aix et Ville d’Aix-en-Provence 7.5 % ; Toulon Provence Méditerranée 7.5 % ; Ensemble des autres intercommunalités et villes 7.5 % et Partenaires économiques (mécènes) 15.0 %.** L’investissement exemplaire des mécènes a été salué par la Ministre de la Culture. A ces chiffres, s’ajoute l’attribution le 12 juillet 2012 par la Commission européenne du Prix Melina Mercouri à Marseille-Provence 2013. Ce prix décerné aux villes qui montrent un travail de qualité dans la préparation de leur programmation récompense MP2013 d’une dotation supplémentaire de 1.500.000 euros pour financer les projets faisant déjà partie de la programmation de la Capitale européenne de la culture en 2013. Contrairement aux idées reçues, le budget est essentiellement financé par les acteurs du territoire MP2013, soit les 97 communes fédérées (au lieu des 130 prévues initialement), auxquels s’ajoutent 4 territoires limitrophes associés (la vallée des Baux Alpilles, Miramas, Port Saint Louis du Rhône et les communautés de communes Rhône Alpilles Durance) ainsi que de nombreuses villes invitées (Bastia, Manosque et Sanary sur mer). L’année capitale représente en chiffres près de 5000km2 de culture avec plus de 1,9 millions d’habitants et entre 900 et 950 projets culturels. Qu’en a-t-il été du choix des projets et de leur financement ?

MP2013 : 950 projets culturels

Sur près de 950 projets, les deux tiers se déroulent à Marseille. Six projets ont été entièrement financés par MP2013 : parmi eux, le Week end d’ouverture des 12/13 janvier (avec son parcours d’art contemporain à Aix, ses grandes clameurs disséminées à Marseille, sa chasse au 13’or en région et un spectacle pyrotechnique à Arles), le GR2013, Transhumance, les deux expositions présentées au J1 et l’exposition ICI, Ailleurs à la Friche. Cinq cent vingt cinq projets sont financés par MP2013 selon une fourchette de 3000 à 800000 euro, et trois cent quatre vingt trois ont été labellisés mais ne sont nullement financés par l’association. Ce dernier point fait grincer bien des dents auprès des acteurs locaux labellisés, sachant que l’association ne les aide même pas à trouver de lieux de répétition ou des espaces de jeu***. Lille 2004 avait, avec un budget inférieur de près de 20 millions d’euro, proposé 2500 manifestations culturelles et impliqué 17000 artistes de la région. MP2013, dont l’ambition affichée est de recevoir plus de 10 millions de visiteurs contre 9 millions pour Lille 2004, propose ainsi près de trois fois moins de manifestations que Lille 2004. Or, plus de 2200 projets avaient été déposés par les acteurs locaux lors de l’appel lancé en 2009 pour les labellisations MP2013. La sélection effectuée a privilégié les acteurs culturels de renommée nationale, européenne voire internationale selon le principe de l’exemplarité et de l’excellence défini en haut lieu. Ce mode de sélection a frustré plus d’un acteur local, notamment dans le domaine du spectacle vivant : certains festivals vieux de plusieurs décennies n’ont reçu aucun label alors que leur qualité méritait une plus ample mise en valeur de leur travail***. MP2013 leur a préféré la création de festivals ad hoc tels que le Festival de Pâques ou Cirques en capital, justifiant ses choix par la portée européenne de l’événement. Ceci dit, à décharge, Marseille-Provence 2013 s’appuie sur des festivals de la région pré-existants tels que le festival d’ Art lyrique à Aix, la Fiesta des Suds à Marseille… mais aussi Marsatac (musiques nouvelles), le festival de Jazz des Cinq continents, Les Suds à Arles (musiques du monde) ou encore act’Oral (écritures contemporaines). Notons cependant que la plupart des élus sont des festivals de renommée nationale, au rayonnement international, invitant des artistes mondialement reconnus. Toutefois, parmi les nombreux projets tels que les quartiers créatifs ou les ateliers de l’euroméditerrannée, une initiative retient l’attention : c’est la création de « Cahier de vacances » , un festival jeune public qui se déroulera pendant les vacances de la Toussaint 2013, offrant la possibilité à des compagnies régionales de petite taille de présenter leur création à l’occasion de cet événement et, qui sait, de bénéficier d’une visibilité élargie à l’international.

Ce festival est aussi un moyen de sensibiliser les jeunes à la culture et de les en rendre acteurs. Ce micro événement dans l’événement ne pourra que séduire Madame la Ministre dans sa démarche tant il semble correspondre aux orientations de son ministère*. Un des événements de MP13 à découvrir ! DVDM

* voir article sur Aurélie Filippetti intitulé Lancement de MP13

Rmt News Int • 17 novembre 2012


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Comments

  1. Natalie S. Dalton 15 janvier 2013 - 22 h 02 min

    Jamais une Capitale européenne de la culture n’a été autant sponsorisée. Presque 15% du budget de Marseille-Provence 2013 viennent d’entreprises de la région. Et elles espèrent bien dix euros de retombées pour chaque euro investi. Corinne Brenet, spécialiste culturelle de l’Union pour les entreprises 13 (UPE 13) à Marseille, parie que le feu d’artifice culturel sera aussi un événement majeur pour le développement et le rayonnement de l’économie régionale. Mme Brenet est également PDG de Courtage de France-Assurances et présidente de Mécènes du Sud, une association regroupant 32 entreprises soutenant l’art de la région.

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