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Etape de Travail autour de COPI – Friche belle de Mai

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L’Homosexuel ou la Difficulté de s’exprimer, compagnie les gens d’en face,

Étape de travail présentée à la Friche belle de mai le 6 avril 2012

Coproduction Théâtre Comoedia, Théâtre des Bernardines

Écrite en 1971 en Français, par l’argentin Copi, également dessinateur pour Hara Kiri et Charlie Hebdo, L’Homosexuel ou la Difficulté de s’exprimer, est une pièce de théâtre traitant de ce que nous nommons aujourd’hui ‘transgenre’, plus précisément la transsexualité en mettant en scène des transsexuels hommes/femmes vivant des amours homosexuelles.

Pour la petite histoire, le spectateur se trouve face à un huis clos en Sibérie où la professeure de piano, Madame Garbo, vient chercher son élève Irina, qui depuis deux mois refuse d’aller à ses cours, préférant côtoyer les cosaques ou plutôt ‘se faire sauter‘ par tout ce qui bouge, y compris Garbenko, le mari de la Garbo, et la Madre, sa mère adoptive avec laquelle elle entretient des rapports amoureux complexes aux limites du sadomasochisme. Madre s’est faite opérée pour être déportée avec Irina, jadis opérée au Maroc pour ‘se faire pousser les seins’ avouera-t-elle. Madame Garbo veut emmener en Chine celle qu’elle aime : Irina, cette enfant à la fois pure et machiavélique, absente d’elle-même qui s’oublie dans le sexe quitte à en subir physiquement les conséquences. Ici, à l’exception de Garbenko et Pouchkine, les trois figures principales de la pièce sont des transsexuels – et non des travestis- soit deux hommes s’étant transformés en femme – l’un complétement, l’autre par amour mais dont on soupçonne qu’il a gardé son sexe masculin- et une femme ayant un sexe d’homme mais conservant ses attributs féminins, opérée plus ou moins contre son gré. Copi, dont l’écriture est sans fard – le vocabulaire cru et direct peut choquer les âmes sensibles-,  questionne avec justesse l’être. De cet homme ou de cette femme, qui suis-je ? Qu’est ce qui me constitue homme ou femme ?

La mise en scène proposée par Christophe Chave est sobre et efficace ; un escalier en colimaçon grinçant et un mur aux couleurs sombres pour unique scénographie, un bac à glaçon – à la symbolique un peu trop appuyée- sur le coté pour seul élément de décors. Afin d’interpréter les personnages, il a fait appel à cinq comédiens hommes, un choix judicieux. Irina, vêtue d’une chemise de nuit blanche, à la gestique saccadée, au corps désarticulé, un masque d’impassibilité sur le visage, le regard perdu dans des nimbes lointaines ; Madre avec sa robe et ses chaussures rappelant ses origines modestes, s’agitant dans tous les sens derrière sa fille adoptive ; Garbo avec sa fourrure et ses talons signifiant la noblesse de son rang, le port digne et la démarche faussement assurée. Garbenko en habits noirs, avec ses allures militaires et son défaut de langue, Pouchkine avec son long manteau distingué ne sachant marcher avec ses talons. 

Chacun des comédiens est fort juste dans son interprétation, avec une mention spéciale pour ceux qui incarnent Irina et Garbo. La sobriété de leur jeu – en contraste avec l’aspect surréaliste du récit, Irina aurait avorté d’un petit que lui aurait fait Garbo, sans compter les multiples rebondissements internes au récit- fait éclater avec plus de violence les meurtrissures des personnages mutilés dans leur chair et la difficulté de leur condition. Le spectateur peut sentir le basculement vers l’horreur d’une situation à l’issue fatale. Hélas, l’arrivée maladroite de Pouchkine oriente le public vers un rire – certes nerveux- mais un rire qui, au regard du sujet, n’est pas de mise. Notamment dans cette mise en scène où le transsexuel n’est -pour une fois et fort heureusement- pas représenté comme une grande folle hystérique mais sous un jour plus proche d’une réalité quotidienne.  

Cette étape de travail donnera lieu en 2013 à une trilogie autour de la question du genre, projet certes labellisé 2013 mais dont le financement et les lieux de représentations restent à trouver encore pour la compagnie régionale. Le projet en trois parties inclura ‘les quatre jumelles’, une pièce déjà créée par la compagnie. A SUIVRE. DVDM.

Rmt News Int • 8 avril 2012


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