Une bouffée de réel
En ce mois des fous, hyper chargé en événements, parmi eux citons Mars en Baroque, le Festi’femmes, le Forum Mondial de l’eau avec la présentation en avant première de la dernière création chorégraphique de Jean Charles Gil, le Carnaval de Marseille, Babel Med Music, s’ouvre la première biennale des écritures du réel, initiée par la Cité -Maison de théâtre. En ce vingt-et-unième siècle, les écritures contemporaines dans le milieu du spectacle vivant sont largement mises à l’honneur, de nombreux théâtres marseillais dont la Minoterie ou les Bernardines en ayant déjà fait leur spécificité. Alors pourquoi une biennale des écritures du réel si il existe déjà de nombreuses propositions allant dans ce sens ? Cette Biennale n’a pourtant pas pour objet d’être une resucée de ce qui existe déjà ou un festival supplémentaire dans une ville où il ne se passe pas un mois sans que le public puisse découvrir un festival : fleurissantes déjà sont les propositions artistiques des acteurs culturels de notre ville avec une montée en crescendo dès la fin de l’hiver.
La conclusion logique d’un travail au long cours
Ici, pourtant, il ne s’agit pas d’une création d’un festival ad oc. L’objet de travail de La Cité – Maison de Théâtre a toujours été en prise avec le réel : depuis leur installation à Marseille les fondateurs de ce lieu pluridisciplinaire ont toujours eu la volonté de travailler avec le public d’un territoire sur des thématiques proches de leur questionnement quotidien. Rappelez-vous donc le spectacle Nous ne nous étions jamais rencontrés avec 5 jeunes venant d’horizons divers. Un travail de proximité immédiate avec le quotidien ; voilà ce que font Michel André et Florence Lloret depuis plus de dix années. Leurs propositions sont toujours fondées sur des témoignages, des récits autobiographiques et des expériences. L’idée d’une biennale autour de ces écritures, qu’elles soient plastiques, contées, théâtrales, cinématographiques ou chorégraphiques, ne pouvait que germer dans l’esprit de Michel et Florence. Questionner le réel pour mieux s’en saisir, mieux l’appréhender au-delà des illusions, la démarche prend tout son sens de nos jours où l’over-médiatisation et la surconsommation ont fait perdre tout rapport au réel. Ces deux phénomènes ont largement contribué à travestir notre rapport à l’autre, à la personne, au quotidien, à la vie. Le sujet réel et concret s’est peu à peu disloqué et a disparu derrière l’objet fantasmé –illusoire- ou abstrait. Ce constat ne pouvait que donner lieu à une proposition artistique pluridisciplinaire. Néanmoins, pour voir aboutir un tel projet, la Cité devait faire appel aux acteurs culturels de la ville. Il ne servait à rien de présenter seul un projet de si grande envergure, sous-tendu par la notion de partage, d’échange et de découverte, au cœur duquel se situe la personne réelle.
Le rassemblement des acteurs culturels sur un projet ambitieux et généreux
Lorsque Michel André a contacté les structures culturelles marseillaises et régionales pour les associer à ce projet, toutes ont spontanément adhéré à l’idée d’une biennale des écritures du réel. Chacun y est allé de ses propositions et les ont incluses dans leurs plaquettes annuelles. Parmi la longue liste de lieux partenaires, citons la Minoterie qui ouvrira officiellement la programmation de la biennale le 14 mars dès 18h30 avec L’exposition Trouble Pictural (14 au 21 mars) suivi de la création de ‘l’Alphabet des oubliés’ (14 au 16 mars), la création de la compagnie de la Cité nourrie de l’œuvre du poète Patrick Laupin, le poète dialoguant avec les enfants sur la thématique de la transmission de la parole. Rencontres et concerts clôtureront la représentation au fil des soirées. Des échanges ponctueront les moments de théâtre au cours de cette biennale dont une table ronde sur le réel en jeu le 18 mars à l’équitable café à 11h puis une rencontre sur le thème de l’héritage à 16h avec James Agee. La guerre sera abordée en plusieurs temps ; ce thème difficile, hélas toujours d’actualité, donnera lieu entre autres à des propositions marionnettiques et chorégraphiées avec Congo My Body au théâtre des Halles les 22, 23 et 24 Mars en Avignon sur les mémoires d’un ex-enfant soldat devenu danseur. La question de ces étrangers qui nous sont pourtant si familiers ouvrira les portes de l’autre rive, cette autre partie de la Méditerranée, avant de plonger dans les sources africaines avec un spectacle belgo-camerounais au théâtre des Doms les 22 et 23 mars. ‘Celui qui se moque du crocodile n’a pas traversé la rivière’ – proverbe camerounais- est une immersion dans la réalité burkinabè -le spectacle ayant été finalisé au Burkina Faso- mais aussi l’expérience de vie d’un blanc dans un contexte africain. L’exploration des cultures aura la part belle au cours de ce festival avec ‘Django Reinhardt, une fiction’ présenté dans le cadre du festival Latcho Divano autour de la question des Roms le 23 mars, Cité de la musique, 20h30. Des documentaires s’inviteront à l’Alhambra avec le film ‘Ce n’est qu’un début’ de JP. Rozzi et P. Barougier le 28 mars, 14h30, sur la notion troublante de la liberté amenant autant de questions sur l’amour, l’emprisonnement, la différence… Le 30 mars, ‘jusqu’ici tout va bien’, création de la Cité, sera joué au collège Henri Wallon à 19h. Après une pause autour de l’Algérie fin Mars, les amateurs seront mis à l’honneur en Avril au point de bascule avec ‘Atlas, fragments de récits du monde’ le 2, 19h. Le 6 avril, les amateurs du spectacle ‘Cargo Sofia’, cette balade-spectacle dans un bus autour des ports de Marseille présenté par le Merlan en 2010, pourront retrouver un des concepteurs du spectacle, Stefan Kaegi qui nous fera découvrir une de ses dernières aventures de création à la Cité, 20h30.
La Biennale des écritures du réel dont nous vous présentons qu’une infime partie du programme s’achève le 7 avril autour d’un verre des 19h à la Cité. Alors rendez vous le 14 mars pour la toute première de ce festival qui mêle habilement réflexions et art, moments de convivialité et thématiques graves. Bonne biennale. DVDM
Plus d’infos sur
http://www.maisondetheatre.com/biennale-des-ecritures-du-reel/
Photos
Ce n’est qu’un début (c) JP Pozzi et P Barougier
Celui qui se moque du crocodile n’a pas traversé la rivière (c) DR
Congo my body (c) E. Bartolucci





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