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Made in Asia, semaine 1

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Pour l’ouverture du festival, place du capitole, au sein de la Mairie de Toulouse, sous ses voutes ornées de peintures magnifiques, le public était bel et bien au rendez vous. Les officiels, citons Monsieur Lu, représentant de Taiwan en France- portrait ci-dessus-, M. Cheng, directeur du centre culturel de Taiwan à Paris, le Maire de Toulouse, M. Cohen, et les artistes invités du festival ont honoré le président du festival Didier Kimmoun de leur présence. Une inauguration aux couleurs de Taiwan, suivie du spectacle Remix : Hsu Yen Ling * Sylvia Plath, qui reçut un très bel accueil du public Toulousain puis dans la semaine d’une soirée danse avec Yilab et Shang-Chi Sun.

Une ouverture sous le signe de l’art contemporain : le monodrame de Hsu Yen Ling

Le choix du spectacle d’ouverture n’est ici pas innocent : en effet, qui d’autre que Hsu Yen Ling, surnommée la Reine du Ciel dans son pays, comédienne hors pair, pouvait inaugurer cette édition de Made in Asia dédiée à Taiwan, au théâtre Garonne les 25 et 26 janvier. Situé aux antipodes des chinoiseries traditionnelles, ce spectacle au décor minimaliste mêlant V-jaying, projection vidéo, danse et jeu, sur fond de création sonore inquiétante, a pu déconcerter une partie du public. Ce dernier s’attendait peut être à une création d’inspiration plus taïwanaise. Mais tel ne fut pas le choix artistique du président : ce dernier souhaite faire découvrir aux occidentaux la richesse et la diversité des arts taïwanais contemporains qui s’inscrivent dans une démarche où modernité et tradition s’entremêlent. Ici, Hsu Yen Ling incarne avec fureur et folie Sylvia Plath, poétesse américaine s’étant suicidée fort jeune, tourmentée par l’abandon de son mari. A ses côtés, le danseur-chorégraphe tout en retenu interprète merveilleusement la figure du père et du mari. La pièce au rythme haletant nous emporte dans un tourbillon d’émotions où la cruauté, l’amour, la haine, la passion, la folie, la déchirure, la mort et l’écriture explosent et s’exposent dans leur troublante nudité. Sous les traits de Hsu Yen Ling dont nous ne pouvons que saluer la performance exceptionnelle.

Épure et technologie avec deux créations de danse contemporaine taïwanaise

L’espace Bonnefoy accueillait, le 27 janvier, deux artistes de grands talents pour une soirée placée sous le signe de la danse avec ‘Loop Me’ de la compagnie Yilab et ‘Traverse’ de Shang Chi Sun. Su Wen Chi, conceptrice et interprète de ‘Loop Me’, artiste que le public français a pu découvrir en 2007 au festival d’art lyrique d’Aix en Provence dans les ‘Madrigaux’ de Monteverdi, proposait au public une création chorégraphique mêlant danse, vidéo et son, traités à part égale, sur la thématique du rapport entre le corps et l’image. La question qui sous tend cette création est celle de l’existence du corps dans le monde digital actuel. Comment le corps peut-il exister dans un procédé de reproduction tournant quasi indéfiniment en boucle ? Wen Chi exécute une danse allant crescendo, explorant le corps avec tendresse et lenteur jusqu’à l’aliénation, passant de mouvements rappelant les arts martiaux tels que le Tai Chi à la danse contemporaine aux mouvements plus saccadés et vifs, balancements des bras tels des toupies prêtes à se dégager de leur attache matérielle. Ici, la création vidéo de YEH Chien-Bu, au demeurant d’une qualité artistique rare, est capitale. Les images répètent à l’infini les mouvements de la danseuse, en trois plans désynchronisés, jouant sur la disparition du corps au profit de l’image. Cette dernière finit, elle aussi, par disparaitre, s’autodétruisant à force d’être répétée en boucle, comme lorsque nous regardons de vieilles vidéos sur magnétoscope et que la bande usée jusqu’à la corde nous laisse entrevoir une image floue, indécise, tremblante, envahie de rides blanchâtres jusqu’à faire disparaitre dans un halo d’une clarté insoutenable le contenu de l’image elle-même, perdue à jamais. La création sonore d’inspiration techno minimale, de CHANG Yung-Ta, accompagne avec justesse les mouvements de Wen Chi et la vidéo, conférant une atmosphère troublante à ce spectacle. Une réussite tant technique qu’artistique. Shang Chi Sun, quant à lui, offrait au public un solo de danse des plus minimalistes, accompagné d’une musique électro grinçante. Les grondements et cliquetis rythment la danse épurée de Shang Chi. Ce dernier, danseur exceptionnel, au talent incroyable et à l’expressivité faciale inouïe, chose rare en danse contemporaine pour le souligner ici, occupe avec élégance, légèreté et profondeur tout l’espace scénique, alternant pas de danse -pirouettes, roulades, enjambées, petites foulées- et mouvements au sol du corps d’une précision et d’une puissance magnifique avec une gestique toute en douceur et souplesse. Tel un félin. Tout dans son corps est tension, de cette tension exquise d’un envol vers un ailleurs fascinant. Un sentiment de joie et de plénitude émane ainsi du danseur et enveloppe le public littéralement absorbé dans sa performance. ‘Traverse’ se révèle être un voyage poétique et beau : il a remporté à juste titre l’adhésion du public toulousain.

Spiritualité et art plastique avec Tseng Yong Ning

Autour de ces deux créations, se tient en salle d’exposition de l’espace Bonnefoy une présentation des œuvres de Tseng Yong Ning – ici avec Didier Kimmoun. Le jeune plasticien travaille essentiellement le stylo bille et l’encre dans ses œuvres picturales. Trouvant son inspiration dans les jardins de fleurs, l’artiste semble retranscrire avec son stylo les élans naturels de l’âme contemplative, dans un processus proche de l’écriture automatique pratiquée chez nous par les surréalistes. Les couleurs vives utilisées, vert, rouge, orange, jaune, évoquent les paysages floraux de Formose. Les formes rondes ne sont pas sans rappeler la philosophie chinoise du yin et du yang où toute dualité se confond en une complémentarité organique, indissociable. Le jeune artiste en résidence à la galerie lieu commun exposera ses dernières créations dans la galerie Toulousaine dès le 2 février.

D’autres artistes taïwanais restent encore à découvrir avec ‘les charmes de Taiwan’ par les Ten Drums, le 3 février à la salle Nougaro et ‘la Naissance’ de Chou Jung Shi, le 4 février à la médiathèque José Cabanis, deux créations nous dévoilant les sources de la spiritualité et mythologie chinoises que nous vous recommandons très chaudement avant la découverte de la fin de résidence de Wang Xin Xin le 8 février. DVDM

Plus d’infos : Madeinasia.com
Copyright photos : Shakespeare Wild Sister’s group pour Sylvia Plath; Yilab pour Loop Me et Shang Chi Sun pour Traverse.
Les autres photos sont de Diane Vandermolina.

Rmt News Int • 30 janvier 2012


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