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Pour le sourire de Mimi

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L’opéra de Marseille est actuellement en rénovation depuis plusieurs mois : il suffit de jeter un œil aux algécos sur le devant du parvis mais rassurez vous toutes ces réfections de façade devraient s’achever avant l’été 2012… La programmation du temple du lyrique marseillais continue à égrener les œuvres, alternant ouvrages méconnus et incontournables tubes lyriques. Pour cette fin d’année, une fois n’est pas coutume, est proposé au spectateur un drame… Ce ne seront donc pas les traditionnelles opérettes enlevées d’Offenbach, sinon une œuvre magnifique, à la fois joyeuse et tragique, qui sera offerte au public marseillais et étranger: ‘la Bohème’ de Puccini. Un choix se révélant fort judicieux. Avec dans le rôle de la fragile Mimi, une des plus talentueuses des jeunes sopranos françaises de notre époque : Nathalie Manfrino.

La Bohème revisitée par Jean Louis Pichon : un pur moment de bonheur

Cette Bohème-là n’a rien à voir avec celle mise en scène par Mireille Laroche qui fut présentée en 2003 en ce même Opéra. En effet, le parti pris de Jean Louis Pichon ouvre de nouvelles perspectives dans l’interprétation de l’Opéra, lui ôtant ses habits misérabilistes dont on le pare hélas trop souvent et pas forcément à juste titre. La Bohème, quatrième opéra vériste de Puccini, raconte la vie de bohème de quatre jeunes gens, artistes de surcroit– Rodolfo le poète, Marcello le peintre, Coline le philosophe et Schaunard, le musicien. Nos quatre joyeux lurons s’amusent à vivre la pauvreté sur les toits de Paris, jusqu’à ce que la vie, l’amour et la maladie, la mort les rattrapent, en les personnes de Mimi, la frêle petite brodeuse et Musetta, la courtisane.
Cette production a été créée à Monte Carlo puis a tourné à Saint Etienne et en Wallonie avant de venir à Marseille. Une chose rare car hélas, souvent, les créations ne tournent pas. Cette Bohème aura eu une trentaine de représentations au compteur, avec dans chaque Opéra une distribution différente. C’est un spectacle ‘amorti’ pour reprendre les mots du metteur en scène. Ce dernier avait répondu à la proposition du directeur de l’Opéra de Monte Carlo, il l’avait déjà montée et appréciait beaucoup la musicalité de l’œuvre. Cette dernière fait appel au jeu d’acteur des chanteurs et nécessite une crédibilité physique des interprètes. ‘Il fallait rassembler une distribution valable vocalement et théâtralement. Que les chanteurs aient une belle présence scénique. Il fallait de jeunes chanteurs motivés.’ Certes depuis la création, la mise en scène a évolué et, Jean louis Pichon, homme de théâtre, comédien et metteur en scène pointilleux mais ouvert, travaille de concert avec les artistes, écoutant leurs propositions–’ les artistes ne sont pas des pièces sur l’échiquier’ dit-il- même si l’idée de base reste la même.
Sa mise en scène joyeuse et colorée offre un écrin de légèreté à cette tragédie magnifique, sur fond de scénographie représentant les toits de Paris, une scénographie dont il se sert merveilleusement, la transformant au grès des actes en intérieur d’une mansarde parisienne aux meubles rappelant un passée opulent, en Café du quartier latin foisonnant de couleurs et débordant de joie, en ruelles quasi désertes et tristes, balayées par les pauvres travailleurs du matin. ‘Ma Bohème n’est pas réaliste et je ne la voulais pas misérabiliste, les personnages ont des références, une façon de parler qui n’est pas représentative de la classe ouvrière. Ce sont plutôt des artistes qui font l’expérience de la vie de bohème, c’est une expérience de dandy, un jeu et une posture pour eux. C’est pour cela que je voulais de jolis meubles – la méridienne, le pupitre… – et des costumes élégants à la Baudelaire. Ils ont une culture différente du milieu ouvrier et leur jeu télescope une réalité avec la maladie et la mort de Mimi. Ce sont des enfants qui découvrent la mort. Ils ne se préoccupaient d’argent que pour la fête et les filles. Ils n’avaient pas prévu l’amour, et je voulais montrer cet aspect joyeux, ce jeu auquel on croit et qui déborde vers une réalité, la mort.’ Ce parti pris de mettre en avant la légèreté et la gaité des personnages offre un contraste saisissant avec le final tragique qu’est la mort de Mimi. Un retour à la réalité comme un coup de poing. Une claque. ‘Parce que c’est très léger, le retour à la réalité est d’autant plus dur et tragique.’

Un pari réussi car le final nous plonge dans un état émotionnel intense, d’une rare puissance, sublimé ici par le jeu de Nathalie Manfrino. N’hésitez pas à vous rendre à l’Opéra de Marseille pour y découvrir une surprenante version de la Bohème. DVDM

LA BOHÈME
Giacomo Puccini
Jeudi 29 décembre 2011 > 20h
Samedi 31 décembre 2011 > 20h
Mardi 3 janvier 2012 > 20h
Jeudi 5 janvier 2012 > 20h
Dimanche 8 janvier 2012 > 14h30
Mardi 10 janvier 2012 > 20h
La Bohème
Opéra en 4 actes
Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica, d’après le roman Scènes de la vie de bohème d’Henri Murger
Création à Turin, Teatro Regio, le 1er février 1896
Dernière représentation à l’Opéra de Marseille, le 6 février 2003
PRODUCTION OPÉRA DE MONTE CARLO, OPÉRA THÉÂTRE DE SAINT-ÉTIENNE, OPÉRA ROYAL DE WALLONIE
Direction musicale : MARK SHANAHAN
Mise en scène : JEAN-LOUIS PICHON
Assistante : SYLVIE AUGET
Décors : ALEXANDRE HEYRAUD
Costumes : FRÉDÉRIC PINEAU
Lumières : MICHEL THEUIL
DISTRIBUTION
Mimi : NATHALIE MANFRINO
Musetta : GABRIELLE PHILIPONET
Rodolfo : RICARDO BERNAL
Marcello : MARC BARRARD
Colline : NICOLAS COURJAL
Schaunard : IGOR GNIDII
Benoît : FRANÇOIS CASTEL
Alcindoro : ANTOINE NORMAND
Orchestre et Chœur de l’Opéra de Marseille

Plus d’infos…

Rmt News Int • 23 décembre 2011


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