Nathalie Manfrino : une passion
Rencontre avec une soprano passionnée, généreuse et humble
Nathalie Manfrino, la trentaine épanouie, le verbe franc et direct, est une femme comblée tant dans sa vie privée que professionnelle. Elle revient à Marseille dix ans après y avoir débuté dans le rôle de Mélisande, en 2001. Nous ne pourrons jamais remercier comme il se doit Renée Auphan de nous avoir fait découvrir tant de talents français. Maurice Xiberras, en digne successeur, ne pouvait pas ne pas inviter la soprano, lui faire ce cadeau de jouer le personnage de Mimi.
Un double anniversaire
Un cadeau et double anniversaire car c’est en écoutant ‘la Bohème’ quand elle avait une quinzaine d’années qu’est née sa vocation et son désir de devenir chanteuse lyrique nous confie-t-elle avec cette simplicité et humilité qui la caractérisent. Menant de front des études de théâtre et de chant lyrique, après son bac, elle dut faire un choix. Et ce dernier s’est imposé de lui-même, comme une évidence. ‘L’opéra est plus complet que le théâtre : la sensation physique du chant est plus puissante que celle de la voix projetée. La voix chantée a quelque chose de surnaturel. C’est tellement physique que cela me dévore, je ressens une sensation de plénitude. Et puis, il y a l’accompagnement musical, c’est très important pour moi. Quand j’ai eu ma vraie première expérience avec un mois de répétitions pour ‘Pelléas et Mélisande’, ce fut un baptême du feu passionnant mais dur aussi. Il fallait tout ingurgiter d’un coup, et dès le premier jour être au point sur tout. Mon mari m’a beaucoup soutenu pendant cette période difficile.’ Ce retour dans l’Opéra de ses débuts suscite beaucoup d’émotions en elle: ‘Ca m’a fait très bizarre… Je suis directement allée dans la salle, et cela m’a replongée dans mes questionnements de jeune chanteuse qui arrivait dans ce milieu inconnu. Je ne savais pas si j’avais le potentiel mais j’étais heureuse. J’ai de la chance de pouvoir chanter des rôles que j’aime, Manon, Juliette, Marguerite…. Tout chanteur a une affinité avec un répertoire, une voix, une histoire et j’avais l’angoisse de ne pas être cette voix pour les rôles dont je rêvais. Mais il faut être très prudent, la voix est notre outil de travail et nous n’avons que deux cordes vocales.’
L’Opéra pour se sentir vivant
Passionnée, elle décrit avec justesse son travail. ‘C’est un métier qui déchaîne les passions, plus violent que certains autres métiers, on a beaucoup de poids sur les épaules. Par exemple, pour la Chartreuse de Parme – qui sera présenté en février à Marseille, ndlr-, c’est une prise de rôle et je n’ai personne pour me remplacer, je n’ai pas le droit d’être malade, les billets ont déjà été vendus, la production engagée… C’est un métier complet et difficile : il faut développer la mémoire, l’écoute et la patience. Contrairement à ce qu’on dit, ce n’est pas un métier solitaire, c’est un métier social : on se retrouve dans un immense bateau, on fait parti d’un tout. Un spectacle réussi, c’est la somme de toutes les bonnes volontés et du travail de tous. Il n’y a pas de petit ou de sous métier à l’Opéra. Au début, je n’aimais pas parler de mise à nu, mais c’est vrai que c’est un milieu où la sensibilité est exacerbée et quand on crée un opéra, le premier jour, c’est une vraie mise à nu ; pour Juliette, je ne connaissais pas mon Roméo, Sébastien Guèze, et il fallait qu’on soit amoureux. Un nouveau rôle, c’est comme un premier jour de classe, une première rentrée en 6eme… on n’a pas de marque et il faut laisser de coté ses inhibitions. Avant j’étais assez prude et j’ai du le gommer, c’est une question de professionnalisme. Il faut savoir rester simple et généreux, naturel et sincère. Garder cette fraicheur. Je crois dans l’harmonie et si on l’obtient, le public le sent, l’émotion est palpable et l’opéra est réussi. La magie opère. Ce qu’on vit pendant une heure ne se reproduira pas, c’est l’éphémère, l’instant présent. On va à l’opéra pour se sentir vivant, c’est aussi pour ça que je chante. L’opéra ne mourra jamais.’
Le sourire de Mimi
Quand nous lui demandons comment elle aborde le personnage de Mimi, elle ne peut s’empêcher de sourire. ‘C’est un de mes rôles préférés, celui qui m’a donnée envie de devenir chanteuse et j’aime ce souvenir. C’est la seconde fois que je le joue. Mais il faut que je garde mes réserves, ne pas y aller trop à fond… C’est un rôle très dramatique et dès le début, son évanouissement laisse présager sa fin tragique, l’acte III est un drame absolu. Elle n’a pas encore la présence d’esprit de se dire qu’elle est très malade et alors qu’elle est désespérée du recul de Rodolphe, elle entend de sa bouche qu’elle va mourir. C’est un personnage tout en nuance, elle a toujours l’espoir de vivre jusqu’à la fin… D’où son sourire même sur son lit de mort… Cet Opéra, c’est la vie et Puccini est un maitre absolu tant dans la composition musicale que dans le choix des textes… Sono andati, cette phrase est très belle et vraie…
Sono andati? Fingevo di dormire
perché volli con te sola restare.
Ho tante cose che ti voglio dire,
o una sola, ma grande come il mare,
come il mare profonda ed infinita…
Sei il mio amore e tutta la mia vita!
Je remercie Maurice de m’avoir invitée.’
La jeune femme restera sur Marseille puisqu’avant de jouer Traviata, Gilda et Desdémone, elle incarnera la mystique Clélia aux cotés de Sébastien Guèze dans la Chartreuse de Parme, adapté de Stendhal en février. A vos agendas ! DVDM

CANAQUE Gina 10 janvier 2012 - 16 h 18 min
Cela fait 2 fois que j’assiste à un opéra où Nathalie joue le rôle titre ( Faust à Toulon et Mimi à Marseille ) e
t j’avoue que je suis …subjuguée par son talent qui s’affirme d’oeuvre en oeuvre ! Avant cela ,je dois dire que j’ai ” dévouvert en …vrai ” Nathalie à Nîmes dans le Réquiem de Verdi !Magistral ! Que de superlatifs ,allez vous me dire ,mais elle les mérite ! Je ne peux oublier le final de Faust de Toulon qui pour moi surclasse ceux de Bastille ,des Chorégies ,du Met et de Covent Bravo Nathalie,continuez sur ce chemin de la réussite et merci du bonheur que vous me donnez ! Je vous embrasse Gina