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A Marseille, l’Opéra, c’est classe !

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A Marseille, l’Opéra, c’est classe !

La grande Maison qu’est l’Opéra développe depuis une douzaine d’années une action pédagogique d’envergure à destination des jeunes scolaires et universitaires, dans les hôpitaux et prisons, avec des programmes tels que Des clés pour l’Opéra, Etudiants à l’Opéra ou Tandem pour ne citer que ces actions. Les ateliers donneront lieu à un gala le 19 juin à l’Opéra…

L’action pédagogique, menée par Guillaume Schmitt, est l’aboutissement d’un travail de longue haleine avec les professeurs des écoles participantes et les élèves des classes allant du primaire à la 4ème, écoles ou collèges privés, ZEP, structures spécialisée pour malvoyants et malentendants…. Un public de jeunes venant de divers milieux qui découvrent pour la plupart, et quelle que soit leur Catégorie Sociale, l’Opéra pour la première fois… Une action populaire qui mérite d’être suivie et à laquelle le personnel de l’Opéra, chœur, chefs, metteurs en scène, professeurs de chant se joignent avec engouement et plaisir. Tel est le cas de Paule Goltier, qui travaille à l’action pédagogique depuis 6 ans et s’occupe de la mise en scène des œuvres lyriques travaillées par les enfants et leurs professeurs. Selon cette amoureuse de l’art lyrique dans toute sa variété et richesse (qu’il s’agisse des Opéras sérieux ou des opéras bouffe, des opérettes, de la comédie musicale..), il est inconcevable que l’Opéra soit considéré comme un art inaccessible : c’est un des arts les plus populaires qui fait appel à tous les corps de métier du spectacle vivant (costumes, chant, danse, musique, théâtre, lumière….), rendu possible par « ces artisans du spectacle » qu’ils soient techniciens ou artistes… qu’elle les appelle. Et pour cause, l’Opéra appartient à la Vie, c’est une façon de vivre et il n’y a pas d’âge pour apprendre… Femme passionnée par son métier, elle nous relate avec tendresse son rôle dans la préparation des spectacles et son suivi du travail des jeunes : elle assiste aux cours de chants afin de mieux saisir les difficultés des élèves et comprendre comment travailler avec eux la mise en scène. Le temps de travail est bref : quelques mois pour apprendre le chant et monter un spectacle…Mais c’est une aventure qui reçoit un succès énorme, mêlant apprentissage artistique et pratique en tant que spectateur.

C’est pour cette raison que 1200 jeunes ont été invités à écouter le 26 mars en matinée un concert organisé par une trentaine d’artistes issus du chœur de l’Opéra de Marseille. Le chef Pierre Iodice avec enthousiasme a ponctué sa direction d’explication sur les œuvres présentées avec un sens de la pédagogie et du partage indéniable, racontant l’origine de certains morceaux, expliquant les différentes facettes des métiers liés à l’Opéra, parlant de l’hygiène de vie mentale et physique, nécessaire aux artistes d’Opéra qu’ils soient choristes ou solistes, de l’engagement total et de la passion qui les meut : être chanteur d’Opéra demande beaucoup de sacrifice et de travail, car il faut apprendre les ouvrages dans la langue, maîtriser plusieurs œuvres, mais cela offre une telle richesse en émotions fortes et en rencontres avec des metteurs en scènes internationaux… ! Et même s’il est à regretter que n’ont été présentés que des chœurs d’Opéra sérieux (Gounod, Bizet, Verdi, Mozart, Tchaïkovski, Haendel…des classiques du répertoire), la qualité du travail et de l’accompagnement au piano ainsi que la beauté des airs ont conquis le cœur des élèves : ces derniers, respectueux du plateau, ont applaudi avec ferveur et questionné avec intelligence les artistes à l’issue de la représentation, certains posant des questions peu banales. Par petits groupes, ils ont pu en apprendre davantage sur les différents métiers et le travail des choristes. Un bel exemple d’action réussie, lorsque nous remarquons le calme de ces petits venus de tous les milieux puisqu’étaient présentes : les écoles de Lacordaire, Guadeloupe, Chabanon, l’institut Arc en ciel, Saint Thomas d’Aquin, le Collège Pythéas et Saint Mauront. Ainsi que la satisfaction des professeurs et parents accompagnateurs.

Nous avons ainsi rencontré plusieurs représentants des différentes écoles participant à l’action pédagogique. Madame Hugorenq de Lacordaire nous raconte l’engouement des parents et des enfants pour cette action qui même si elle demande un investissement en temps important permet d’offrir à tous les enfants une ouverture sur un art qu’ils ne connaissent pas et ce, qu’ils soient de familles aisées ou non. « Ils se retrouvent plongés dans quelque chose de beau qui les dépasse » bien plus que la simple écoute d’un CD et pour cause, à l’Opéra, l’émotion et le partage sont au cœur du ressenti de chacun à l’écoute et à la vision d’une œuvre. Et même les enfants malvoyants ou malentendants, comme c’est le cas des élèves de l‘institut arc en ciel (école travaillant à développer les sens des petits déficients visuels ou auditifs afin qu’ils puissent mieux saisir ce qui les entoure), arrivent à sentir les émotions et découvrent une ambiance sonore qui les sort du rituel de la Télévision, les ouvrant sur le monde comme le dit si bien Régine Champion, institutrice. Cette ouverture est corollaire à une mise en confiance des jeunes : pour reprendre les mots de Sabine Samto, du collège de Saint Mauront, le fait de faire travailler les enfants sur une œuvre lyrique comme Mireille l’an passé ou la Manon de Massenet cette année permet de se poser des questions sur leur quotidien et prendre confiance en eux. « Certaines jeunes filles ont à l’occasion de la représentation décidé de ne plus porter le voile, ce qui a permis d’ouvrir des discussions avec les parents. Là, cette année, nous développons une réflexion sur la richesse au travers de Manon Lescaut. Quelle est la place de la richesse dans la vie ? » Ce sont des débats que le collège amorce via l’introduction de cours de philosophie dès la 6ème, cours basés sur des questionnements de la vie de tous les jours; ce qui n’empêche pas les professeurs de les faire travailler sur des textes plus complexes. Une initiative à encourager tant il est vrai que l’art et la philosophie sont deux des meilleurs médiums pour apprendre et découvrir le monde, s’ouvrir à l’autre.

Découvrir une culture, un patrimoine historique, c’est aussi ça le projet pédagogique : Gilles Bierry, conseiller musical au sein de l’inspection académique, était présent ce jour. Il nous a appris que depuis 2008, une nouvelle directive de l’éducation nationale vise à introduire dans le cursus scolaire des cours sur l’histoire des arts au travers de 6 périodes, 6 arts. Une approche pluridisciplinaire et historique qui permet de se réapproprier un patrimoine culturel en voie de disparition : de nombreux jeunes ne savent même plus comment étaient vêtus les contemporains de Molière… Chose aggravée en art depuis plusieurs décennies par cette volonté de moderniser à tout prix les œuvres classiques, volonté de faire table rase d’un passé qui pourtant fait partie intégrante de notre histoire et de notre art, nous constitue. « Sans tomber dans la nostalgie d’un passé magnifié, il est important de retrouver cette oralité qui disparait. (…) Dans notre société de l’immédiateté, du zapping, les éléments du passé ont une actualité forte. » L’Opéra offre des émotions et « les enfants en sortent émerveillés, comme ce fut le cas le soir de la générale d’Attila pour le petit Karim (6 ans) qui m’a dit avoir aimé parce que « C’est pour de vrai ». Vivre cette musique incarnée est nouveau pour ces enfants habitués à la musique en boite. » Il suffit ainsi d’écouter ces mots enthousiastes d’un petit et de voir la joie sur les visages des enfants pour se rendre compte du bonheur que cette action peut procurer à des milliers de jeunes têtes blondes, rousses et brunes.

DVDM

Rmt News Int • 28 mars 2010


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