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Alexis Gruss et ses quarante chevaux !

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Alexis Gruss et les Farfadais, pour leur troisième collaboration, sont en tournée en Région Paca : après le Palais Nikaia de Nice les 11 et 12 mars, et, avant une tournée nationale d’une bonne trentaine de dates aux quatre coins de la France, ils viendront présenter leur dernière création, mêlant spectacle équestre et aérien, bien nommé « Quintessence », au public marseillais les 14 mars à 20h et 15 mars à 15h dans la salle du Dôme. Ce dernier accueille pour la première fois des chevaux sur sa scène !

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Quintessence,  43ème création au compteur du cirque Gruss, un spectacle estampillé AOC

Une fois n’est pas coutume, nous vous présentons ici un spectacle grand et tout public, une grosse production en somme! Cette création, qui a nécessité trois années de travail et préparation, fait suite à leur précédent spectacle « Pégase & Icare », succès critique et public.

Dans ce nouvel opus, «  afin de sauver Pégase, le cheval ailé réputé indomptable, et après qu’Icare se soit brûlé les ailes, Joseph fils de Bellérophon, doit accomplir une mission. En héros valeureux, il devra récupérer un fragment de l’essence de chaque élément : l’Air, la Terre, le Feu et l’Eau » dans le but d’atteindre la quintessence, cette cinquième essence provenant d’un cinquième élément qui se révèlera être l’Amour. Le public pourra y découvrir les voltiges, portés et acrobaties à cheval ou dans les airs, équilibres et jongleries, ballets aériens et aquatiques, carrousel à 26 chevaux et poste équestre qui ont fait la renommée du Cirque Gruss et des Farfadais. Présenté en plusieurs tableaux, variations autour des quatre éléments, et sur trois espaces scéniques, Quintessence plonge le spectateur dans un voyage fantastique au cœur de la mythologie.

Nous ne vous en dirons pas plus afin de préserver la magie de la découverte…Nous allons ici plutôt tenter de mieux comprendre ce qu’il en est du cirque dit traditionnel, en partant à la rencontre d’un de ses représentants.

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Parler du Cirque Traditionnel aujourd’hui

La terminologie de cirque à l’ancienne, voire de cirque traditionnel selon le qualificatif en vogue aujourd’hui, est souvent employé pour souligner l’opposition avec ce qui est couramment appelé cirque contemporain (un pléonasme en soi créé à l’instar du terme de théâtre contemporain*) ou encore nouveau cirque (définition peut être plus adaptée aux nouvelles formes circassiennes  présentées sous chapiteau ou en salle aujourd’hui).  Pourquoi ces précisions terminologiques vous demanderez vous ? Une raison simple est que le cirque est toujours, voire encore plus aujourd’hui, à la mode. Marseille a récemment été baptisée, par les programmateurs étrangers, Capitale Mondiale du Cirque et dispose d’un pôle national du cirque avec Archaos! Mais de quel cirque parlons-nous?

Rappelons ici que la Biennale Internationale des Arts du Cirque s’est achevée en beauté, avec pour l’espace chapiteaux, une fréquentation record et des créations jouées à guichet fermé** : elle présentait essentiellement  des spectacles de nouveau cirque, non dénués de qualité mais sortant de la tradition pour la grande majorité. Or, ce succès incontestable du cirque nouveau, assez largement subventionné, ne doit pas éclipser l’existence, souvent difficile, des nombreux Cirque à l’ancienne présentés en Région, que cela soit sous chapiteau ou encore en salle : ces derniers sont parfois moins médiatisés, voire dénigrés.

Ce cirque-là souffre aujourd’hui d’une mauvaise réputation et d’amalgames et/ou d’a priori fort simplistes le réduisant à un cirque essentiellement proposé sous chapiteau, avec ses roulottes en pagaille et ses animaux (félins et consorts) mal traités, souvent présentés comme des bêtes de foire pour amuser le public. De nombreuses mairies ont même pris des arrêtés municipaux pour les interdire au nom de la souffrance animale. Or, le cirque à l’ancienne ne se résume pas à une exploitation d’animaux exotiques en tout genre ni à la nécessaire présence d’un Monsieur Loyal, d’un clown blanc et de son acolyte, l’Auguste, sur la piste. Cette image d’Epinal relève d’une méconnaissance des traditions du cirque et de son histoire.

De nombreux cirques à l’ancienne mêlent acrobaties de haut vol, création musicale en live et ballets de chevaux dressés avec passion et tendresse, et même si l’usage de la cravache est encore répandu, d’autres formes de dressage basées sur des méthodes plus douces ont fait leur apparition dans le milieu équestre. De même, une nouvelle tendance est née chez ces familles présentant du cirque à l’ancienne : le jouer en salle, la raison étant le coût exorbitant du transport et montage-entretien des chapiteaux. De là à parler de sédentarisation du Cirque, le pas peut être vite franchi et pose la question de l’avenir du cirque.

Comment pérenniser alors le cirque à l’ancienne s’il n’est plus ni nomade ni sous chapiteau ? Alexis Gruss nous livre ici son expérience et sa réflexion autour d’un axe important de son travail : la transmission de son savoir-faire.

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De la nécessaire transmission d’un art ancien

Alexis Gruss est un septuagénaire fringant, au regard bleu gris pétillant de malice, empreint de bienveillance, grand défenseur de son art et amoureux de ses chevaux. Il vient récemment de passer un diplôme d’Etat afin de pouvoir enseigner son art (et son métier) à l’Ecole Nationale des Arts du Cirque de Chalons en Champagne fondée en 1985. Avec amusement, il nous raconte son grand oral devant un jury composé de personnalités du cirque qu’il avait lui-même formé dont le directeur actuel de l’école : « aujourd’hui, pour enseigner, il faut être diplômé ! »

Cet amoureux du cirque, qui n’est aucunement avare en anecdotes et en bonnes formules, se souvient qu’en 1983, il avait visité le Cirque de Chalons en Champagne, avec Jack Lang et à cette époque, nous dit-il, « le cirque sentait le Ricard et était en ruine ».  Un nouveau lieu pour une nouvelle école était trouvé car neuf ans plutôt, le 15 octobre 1974, il avait créé avec Sylvia Montfort la première école de cirque dans les locaux de la Gaité Lyrique, du côté du Marais à Paris. En 1994, tout en conservant son attache parisienne, il a souhaité s’installer dans le Vaucluse à Piolenc (et par là, se sédentariser) afin de pouvoir transmettre son savoir faire au cœur des terres vauclusiennes, également terres d’équitation, au sein du Pôle d’Action Culturelle Equestre qu’il a créé au Domaine de Crochant.

Car la transmission de son métier est, pour l’homme, essentielle : c’est un peu comme « le passage du témoin dans les courses de relais 4 fois 100m ». Elle repose sur la conjugaison « du cerveau et de la main », « le geste étant la chose la plus éphémère qui existe » précise-t-il.  Or « aujourd’hui dans l’art, on a trop sous-estimé la main et favorisé le cerveau » : il travaille alors dans un souci permanent d’équilibre des deux, à l’image de la recherche de l’équilibre du cavalier montant son cheval lancé à pleins galops sur la piste. Et Alexis aime ses chevaux et en prend soin : il ne parle pas de dressage mais d’éducation du cheval. « Ce dernier comprend autant de mots que ce qu’on lui en apprend ».

L’éducation est première. Venant du latin ex-ducere,  elle signifie « conduire l’autre à l’extérieur pour qu’il grandisse » en opposition au verbe seducere qui consiste « à prendre l’autre pour se l’accaparer » même si dans l’éducation, il y a toujours une part de séduction. « Il est nécessaire d’investir pour les vivants, sans négliger pour autant l’étude du passé et la curiosité du présent qui permettent d’avoir l’intelligence de l’avenir », explique-t-il en citant Hugo. Avoir l’intelligence de l’avenir, c’est savoir aussi s’adapter aux nouvelles conditions de travail, d’où sa première expérience de cirque en salle en 2015 : « les salles sont un élément incontournable pour l’avenir du cirque » de nos jours.

Mais alors qu’est ce qui définit le cirque, vieux de plusieurs milliers d’années, à l’histoire complexe et aux influences multiples ? Nous avons posé la question à Alexis Gruss afin qu’il nous éclaire sur cette question cruciale.

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Le Cirque selon Alexis Gruss 

 « Le cirque est le reflet de la société dans laquelle on vit ». Dans sa création, il fusionne deux histoires du cirque, celle de sa famille, accès sur le cirque équestre, avec celle des farfadais, famille d’acrobates.  Car Alexis est héritier d’une vieille tradition remontant à Andrew Ducrow, écuyer pratiquant des numéros équestres acrobatiques -surnommé le Protée à Cheval dans les années 1827. Se référant aux origines du cirque moderne introduit fin 18ème / début 19ème par Astley et consorts, il précise que le mot cirque a été utilisé pour la première fois par Charles Hugues en 1870.

Pour lui, le cirque, c’est et restera un lieu et non spectacle ***: « il se définit par sa piste ronde, de 13 mètres de diamètre exactement (proportions qui se retrouvent au niveau de la circonférence de la terre ou dans le cœur du théâtre antique d’Arles, nous apprend-il) ». Cette piste est « toujours de même taille (13 mètres de diamètres), même forme (circulaire) et même matière (ici, des dalles dans une texture particulière clipsées entre elles, recouvertes de 40 m3 de terre ocre de Provence pour le bien être des chevaux) ». Soucieux de l’étymologie et origine des mots, il explique ainsi pourquoi le cirque contemporain, « c’est du cirque sans cirque ».

Quant au spectacle, « ce n’est pas une démonstration de numéros qui s’enchainent mais c’est apporter de vraies émotions » dans la mesure où « nous avons un rôle à jouer pour porter du rêve, apporter un équilibre dans notre société en laissant place à l’imaginaire, dans un langage universel et vrai, authentique, pour s’approcher de l’harmonie.  On prend la nature offerte et on en sublime le naturel par l’art».  Sur ces paroles, s’achève notre rencontre avec une personnalité humble qui a su conquérir le cœur de milliers de spectateurs, petits et grands, avec son cirque équestre et aérien.

In fine, le cirque en ce qu’il est porteur d’universalité et d’émotions reste un des arts les plus accessibles tout en étant exigeant tant il requiert des années d’entrainement pour le maîtriser et en faire éclater toute la beauté et magie. Alors si vous souhaitez passer un agréable moment et en avoir plein les mirettes, allez découvrir l’univers du Cirque Gruss ! DVDM

Plus d’infos

Quintessence /Création Alexis Gruss et les Farfadais

Spectacle aérien et équestre, pour 40 chevaux, 20 artistes, une chanteuse et un orchestre live.

Au Dôme de Marseille puis en tournée

Les 14 à 20h30 et 15 mars  à 15h

Durée 2h30/ Tarifs à partir de 30€ jusqu’à 70€ selon la catégorie et l’âge

Réservations sur : www.alexis-gruss.com

*Par définition est contemporaine toute personne ou forme artistique présentée de nos jours qu’elles s’inspirent de la tradition ou explorent de nouveaux horizons.

** Le paquet avait été mis sur la communication et l’ensemble des médias ont tous à leur niveau informé le public de cet événement ; ce qui explique –outre la qualité des propositions artistiques sur lesquelles nous reviendrons- le succès de cette deuxième Biennale.

*** A l’instar du théâtre qui désigne le lieu et le genre de spectacle proposé dans le lieu.

Rmt News Int • 28 février 2017


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