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Top départ pour le marathon du OFF 2016

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En marge du Festival In actuellement dirigé par Olivier Py, fut créé en 1966 par André Benedetto, fondateur du théâtre des Carmes récemment décédé, le festival Off. Ce dernier est présidé depuis janvier par Raymond YANA, successeur de Greg Germain, et réunit cette année au 7 au 30 juillet près de 1092 compagnies et 1416 spectacles, présentés non-stop du matin à la nuit dans plus d’une centaine de lieux, théâtres et autres espaces aménagés pour l’occasion.

En préambule

La question que tout curieux, qu’il soit simple spectateur ou professionnel, voire journaliste spécialisé, se pose est la suivante : parmi ce maquis de spectacles en tout poil et de toute sorte, avec ses têtes d’affiche venant du one-man show, ses acteurs connus du petit écran venant pour la plupart de la série phare de France3 (PBLV pour ne pas la nommer), ou encore ses acteurs de cinéma qui s’essayent au théâtre, voire tous ses inconnus du grand public qui viennent pour la première fois à ce festival dont le gigantisme n’a son pareil nulle part ailleurs dans le monde, QU’ALLONS-NOUS VOIR ? Répondre à cette question est bien compliqué et relève du défi, voire de l’exploit ! Il suffit de soupeser la bible du festival et de la feuilleter trente secondes pour avoir le vertige et la refermer tout de suite, sans même jeter un œil aux spectacles proposés tant ils sont nombreux ! Que faire alors ?

Une première possibilité, c’est se laisser guider par son intuition une fois dans la place, au hasard d’une rencontre ou d’une affiche qui va accrocher le regard du badaud. Deuxième possibilité, se faire conseiller par un ami ou lire les conseils dans les journaux spécialisés avec leur horde d’avis sur les spectacles à découvrir, certains se fendant même d’une petite critique de quelques lignes, d’autres d’interviews. Troisième possibilité, pour les plus aguerris, aller voir ses potes ou des compagnies qu’il n’a pas été possible de voir pendant l’année, faute de temps ! Quatrième possibilité, faire un choix drastique et bien resserré autour d’une thématique, d’un genre théâtral ou d’un pays… Et il est vrai que pour le professionnel, avec le millier d’emails d’annonces de spectacles et leur cohorte de dossiers de presse -parfois bien arides à lire-, reçus ces derniers mois, l’envie de laisser en sommeil sa boite email (quand elle n’est pas saturée par l’abondance de courriels) devient de plus en plus pressante au fur et à mesure que le festival approche… Et le choix du non choix semble ici s’imposer ! Ou encore, celui de partir à la découverte sans programme préétabli.

Néanmoins, dans cette jungle où chaque compagnie essaie de défendre sa création en en devenant le VRP, avec ardeur et courage, parfois en faisant preuve d’une grande abnégation, saluons les artistes qui pendant près d’un mois vont devoir tracter sans relâche pour attirer le public dans les salles obscures et climatisées des lieux qu’ils louent pour certains très –voire trop- cher. Car le festival OFF, c’est un coût grandissant d’années en années pour les compagnies de théâtre, à l’exception de certains qui bien rôdés au challenge avignonnais surfent sur une mode théâtrale goûtée du public. Ceux-là rentabilisent leur festival et arrivent même à dégager des bénéfices mais, hélas, ce n’est pas le cas de tous, et encore moins la norme. Et même s’il est vrai qu’Avignon permet de faire des découvertes théâtrales bien jolies, cet aspect commercial- et surtout les abus attenants : locations de logements à prix d’or par les particuliers, augmentation des tarifs dans les domaines de la restauration, abus sur les prix des créneaux dans les salles…– m’a toujours passablement agacée.

Et pour cause, outre le nombre incroyable de spectacles dans le festival, cet aspect monétaire accroit une concurrence sauvage et la défiance entre compagnies et artistes, opposant ceux qui défendent l’humour, le café-théâtre ou le boulevard, genres considérés comme populaires et lucratifs, et ceux qui défendent le théâtre contemporain, à leurs yeux plus « noble », mais bien moins rentable, le tout sachant que les élites adoubées par le monde culturel quant à elles figurent dans le IN. En ce sens, même si les spectateurs peuvent y trouver chaussures à leurs pieds, le OFF ne peut contenter tout le monde : certains artistes acceptent volontiers cet aspect marchand du festival et de leur art, d’autres s’y soumettent sans pour autant l’admettre, voire le réfutent. « A chacun sa vérité », dirait Pirandello ! Je ne me ferais pas juge de la qualité de tous les spectacles du OFF, même si certains me paraissent tout de même hors de propos, mais business oblige et, à moins de développer une « charte qualité » bien difficile à définir aujourd’hui du fait de l’essence plurielle de l’art théâtral (sa pluridisciplinarité) et de sa matière première (l’humain), rien ne peut empêcher la venue de certains spectacles au OFF !

Quelques suggestions

Bien entendu, je n’ai pas encore répondu à la question de ce qu’il serait bon de voir. Pour ma part, j’ai déjà vu plusieurs des créations présentées, et connais un certain nombre de compagnies venant cette année. Ce sont elles que je vous présenterais.

Pour commencer, parlons un peu seul en scène : deux créations de deux types très différents sont proposés dans le OFF cette année, « C’t’à ton tour, Laura Cadieux » de Michel Tremblay, dont le texte, qui raconte les péripéties d’une mère de famille bavarde et obèse, est d’un humour succulent, au théâtre Artô à 16h, et « Derniers fragments d’un long voyage » de Christiane Singer, dont l’interprétation de Jézabel d’Alexis est magistrale tant elle donne chair à ce récit prenant des derniers mois de vie d’une femme atteinte d’un cancer, au théâtre des Corps Saints à 11h (relâche les 11, 18, 25 juillet). Côté spectacle mêlant théâtre et musique, nous vous proposons de découvrir une bien belle création : « El niño Lorca », un hommage vibrant, fantaisiste et émouvant, à Federico Garcia Lorca, l’homme et le poète, avec l’envoutante et sémillante Christina Rosmini, chanteuse qui pour l’occasion se transforme également en excellente conteuse-comédienne sur scène, au théâtre des Trois Soleils à 22h20. La très engagée et militante Catherine Lecoq, chanteuse et comédienne, accompagnée d’un accordéoniste et d’une pianiste, présente, quant à elle, « Femmes du Sud », sur le thème de la solidarité et du bonheur, au théâtre de la Rotonde, du 8 au 18 juillet à 16h05 (relâche le 13, à noter que le spectacle est gratuit pour les personnes privées d’emploi).

Sur le plan des spectacles jeune public, nous vous conseillons très vivement d’aller voir « La Naissance », spectacle franco-taïwanais de marionnettes et théâtre d’ombre, au théâtre de la Condition Des Soies à 14h (relâche les 11, 18, 25 juillet): cette création a vu le jour au Massalia à Marseille en 2011 et raconte la découverte du monde par une petite fille encore dans le ventre de sa maman. Un voyage onirique et poétique, empreint de fantaisie, qui ravira petits et grands, utilisant une technique d’ombre inédite. Pour continuer avec les marionnettes, la talentueuse compagnie Ka propose une création autour de Lovecraft, intitulée « les rats dans les murs », au théâtre de la porte Saint Michel à 13h45 (relâche les 10, 17 & 24). Ce spectacle de 35 minutes est accessible à partir de 15 ans. En matière de poésie, le Théâtre Ephéméride revient au centre de Européen de la Poésie avec deux créations, « Contre les bêtes » de Jacques Rebotier (interprétation Arno Feffer / Mise en scène Patrick Verschueren) à 15h50 les jours pairs et « Quand tu aimes il faut partir » de Blaise Cendrars (récital de poche avec Evelyne Boulbar et Patrick Verschueren) à 15h50 les jours impairs. Côté théâtre-danse, « ZOOM »,  de Gilles Granouillet, mise en scène de Marie Provence, artiste suivie par le théâtre du Gymnase à Marseille, sera présenté à 13h30, à l’Entrepôt du 7 au 27 Juillet (relâche le 19) et relate les espoirs qu’une mère projette sur son fils, Burt, pour lui éviter la misère dans laquelle elle vit. Un spectacle salué par la critique !

Les amoureux de Baudelaire pourront découvrir la première création théâtralisée de la compagnie Marymorgan Witch et l’ordre des Corbeaux, spécialisée en théâtre de rue : « Gargouille de soie » au théâtre des Barriques à 22h25. Vue en avant-première à Marseille, cette ode à la poésie en 13 tableaux, concoctée par deux sorcières, fait la part belle à la danse, avec les interventions de Seren, circassienne, dont les chorégraphies improvisées, sont d’une intensité dramatique forte et d’une sensuelle beauté. A noter, la qualité esthétique des costumes ! Pour finir avec la danse, la compagnie la Parenthèse, dirigée par Christophe Garcia présente « Lettre pour Elena » au Festival d’Avignon Off du 6 au 27 Juillet au Grenier à sel, à 14h20 (relâches les 11, 18 et 24 juillet). La compagnie nous avait déjà régalés au théâtre du Gymnase en 2012 à l’occasion de son dixième anniversaire avec des créations chorégraphiques mêlant burlesque et dérision.

Ceci n’est qu’un tout petit aperçu de quelques spectacles à suivre ou à découvrir cet été. La liste est certes bien réduite mais au fil du mois, nous vous ferons savoir nos coups de cœur, notamment du côté de nos amis taïwanais que nous ne manquerons pas d’aller voir, cette année ! DVDM

Rmt News Int • 7 juillet 2016


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